MILANO (FIBA Basketball World Cup 2019 European Qualifiers) - Lorsque l’effectif de l’équipe nationale d’Italie pour les matchs de la sixième et ultime fenêtre des Éliminatoires pour la Coupe du Monde FIBA 2019 sera communiqué, il y a un nom que les fans des Azzurri s’empresseront d’y chercher.

Pour l'Italie, ce sera la dernière occasion de décrocher sa qualification pour la Chine. La présence de ce joueur rassurerait, tandis que son absence pourrait inquiéter les supporters, ce d’autant qu’il s’est illustré à plusieurs reprises durant ces Éliminatoires. Ce qui est encore plus remarquable que ses prestations, c’est le parcours qu’il a réalisé pour atteindre ce niveau de reconnaissance.

C’est parfois difficile, mais pour arriver à bon port, il faut savoir tout laisser derrière soi. Vous devez quitter la maison pour trouver votre voie, du moins pour une courte période.

Amedeo Della Valle, puisque c’est de lui dont on parle, le sait bien.

Né à Alba, une ville en plein milieu des Langhe - une région qui appartient au patrimoine mondial de l’UNESCO, il a vécu une enfance paisible et heureuse, avec le basket comme passe-temps.

Malgré une solide tradition familiale, ce n’est que vers la fin de son adolescence qu’il envisage vraiment de suivre les pas de son père. Après avoir évolué au sein de l’équipe jeunesse locale de Casale Monferrato, il décide de traverser l’Atlantique en 2011 pour aller faire ses gammes à la Findlay Prep School, au Nevada. Il s’y fait remarquer dès son arrivée, établissant un nouveau record de tirs à trois points marqués (66) par un joueur, détenu jusque-là par Corey Joseph, meneur de l’équipe nationale du Canada et champion NBA en 2014.

L'étape suivante s'avère beaucoup plus compliquée. Débarqué à Ohio State, le jeune italien connaît deux saisons délicates, ne jouant que sporadiquement. L'intensité physique de la NCAA ne convient pas à Della Valle, qui passe le plus clair de son temps en salle de musculation pour essayer de gagner de la masse. Néanmoins, il devient la coqueluche des fans locaux, de par sa personnalité singulière et son style de jeu téméraire, ainsi que son esprit et son sens de l'humour inhabituels.

Son imprévisibilité comme marque de fabrique

Malgré tout satisfait de son expérience aux USA, Della Valle choisit alors de rentrer en Italie et il signe un contrat de cinq ans avec Grissin Bon Reggio Emilia vers la fin de la saison 2013-14. Sous les ordres du coach Max Menetti, entouré de jeunes joueurs comme Polonara, Mussini et Cervi, Amedeo devient rapidement l'un des piliers d'une équipe qui remporte le FIBA EuroChallenge, deux Supercoupes d'Italie et qui dispute deux ans de suite les finales de Serie A.

Prolifique en attaque, Della Valle est surtout connu pour ses tirs à trois points décochés à la vitesse de l'éclair, dignes successeurs des célèbres ‘triple ignoranti’ réussis une décennie plus tôt par Gianluca Basile, modèle de Della Valle et qui a également fait ses débuts à Reggio Emilia.

Parfaitement intégré dans une équipe qui pratique un jeu posé, au point tactiquement, l'arrière a cette aptitude à apporter ce petit plus capable de changer le cours d'un match. À l'opposé, l'imprévisibilité de Della Valle est souvent un casse-tête pour ses coaches et parfois ses coéquipiers. À chaque fois qu'il a le ballon en mains, peu importe à quelle distance se trouve le panier, vous ne pouvez jamais deviner ce qu'il va en faire. C'est passionnant à voir et électrisant pour les fans, mais également la preuve que les gênes peuvent différer entre deux générations d'une même famille.

'Il Marchese'

Comme la plupart de ses pairs, Amedeo est un héritier de la grande famille du basket. Carlo - Della Valle senior - a en effet joué en Serie A pendant presque 20 ans, de la fin des années '70 jusqu'aux années '90. Les parallèles entre le père et son fils s'arrêtent là.

Comme joueur, Carlo était connu comme 'Il Marchese' (le marquis) pour son élégance naturelle - l'opposé d'Amedeo. Altruiste au possible, défenseur dans l'âme et meneur de taille, ses performances sur le terrain s'apparentaient plutôt à du minimalisme, tandis que celles d'Amedeo se classent facilement dans l'expressionnisme. En fait, l'un des rares points communs entre les deux Della Valle est Meo Sacchetti, le coach de l'équipe nationale d'Italie.

Alors qu'il évoluait à Auxilium Turin, Carlo jouait aux côtés de Meo, devenu depuis le coach de son fils. Honnêtement, cette coïncidence n'est pas rare. Ce qui l'est, c'est la parfaite complémentarité des styles de jeu de Sacchetti et d'Amedeo.

Sur le papier, leur association a d'emblée semblée être idyllique. Tout d'abord, Della Valle était précisément ce dont l'équipe nationale avait besoin au moment d'aborder les Éliminatoires pour la Coupe du Monde FIBA 2019 : privée de nombreux joueurs NBA et Euroleague, l'Italie devait impérativement se trouver un scoreur fiable.

De plus, les Azzurri devaient pouvoir s'appuyer sur la fraîcheur et la part d'insouciance de jeunes talents qui ne traînaient pas derrière eux une décennie de résultats décevants. Amedeo Della Valle remplissait idéalement le profil, lui qui ne manquait jamais d'audace sur un terrain et qui n'avait que très peu d'expérience en sélection nationale senior. Il avait été pris comme 12ème homme dans la sélection qui avait pris part au FIBA Eurobasket 2015, alors coachée par Simone Pianigiani, mais il n'avait que très peu joué, et il avait été coupé parmi les derniers par Ettore Messina deux ans plus tard.

Hormis lors de ses expériences à Findlay et Ohio State, il a fréquemment fait partie des sélections italiennes jeunesse, avec comme apogée le Championnat d'Europe U20 FIBA 2013, durant lequel il a guidé son équipe vers le titre continental tout en décrochant les honneurs de MVP de la compétition. Son heure avait enfin sonné, et le moins que l'on puisse dire est qu'il a su saisir l'occasion qui se présentait à lui.

La révélation

Sacchetti a fait confiance à Della Valle dès le début de la campagne qualificative de l'Italie, le 24 novembre 2017 contre la Roumanie, l'alignant d'entrée de jeu. L'arrière de 1.94m a immédiatement affiché sa reconnaissance, devenant le meilleur marqueur de l'équipe avec 18.1 points en 25.5 minutes de moyenne au cours de sept des huit premiers matches des Azzurri.

L'ancien Buckeye tourne à 44,4 % de réussite aux tirs, avec un incroyable 47,2 % à trois points. Il est classé dans le Top 10 des meilleurs scoreurs de la Zone Europe, aux côtés de joueurs comme Dennis Schroeder, Bogdan Bogdanovic et Cedi Osman.

Il a inscrit plus de 22 points à quatre reprises, mais il a surtout su briller quand sa sélection avait vraiment besoin de lui. Lors de la victoire cruciale contre la Pologne, en septembre dernier, Amedeo a totalisé 28 points en 29 minutes, avec notamment un 8-sur-11 à trois points - nouveau record des Éliminatoires Zone Europe.

À chacune de ses apparitions, Della Valle a fait preuve de la même détermination et de la même assurance que tout au long de sa carrière : prendre les tirs dès que l'option se présente à lui. Lorsque le ballon quitte ses mains, les supporters de l'Italie retiennent leur souffle, tout comme ses coéquipiers et ses coaches. Son adresse et sa confiance ont fait de lui un pilier du sytème de Sacchetti, qui a su révéler le potentiel de Della Valle. Son futur immédiat avec l'Italie reste toutefois peu clair.

Les défis et les souvenirs

Le nouveau statut de Della Valle en équipe nationale n'est en fait pas l'unique chose que le natif d'Alba a acquis récemment. Au début de l'été, il a rejoint les rangs du puissant Armani Exchange Olimpia Milan, saisissant ainsi l'occasion de jouer en Euroleague.

Avec la conséquence suivante : Amedeo a dû trouver sa place aux côtés de stars établies comme Mike James, Nemanja Nedovic, Dairs Bertans et Vladimir Mivoc. Le temps de jeu n'est jamais garanti, tout comme sa participation à la prochaine fenêtre des Éliminatoires pour la Coupe du Monde. Les calendriers de Milan et de l'Italie ont tendance à se chevaucher et Piangiani, ancien coach des Azzurri actuellement à la tête du champion de Serie A en titre, ne semble pas disposé à libérer facilement sa nouvelle acquisition si adroite aux tirs.

D'un autre côté, les deux derniers matchs des Élimininatoires - contre la Hongrie et la Lituanie - sont cruciaux en vue d'une qualification pour la Coupe du Monde, synonyme d'un retour de l'Italie au tout premier plan pour la première fois depuis 2006. De plus, pour les Azzurri, la perspective d'affronter les géants venus de la Baltique fait revenir de doux souvenirs de réussites historiques, d'habitude marqués par une avalanche de triple ignoranti.

Un succès face à la Hongrie ou à la Lituanie (déjà qualifiée) leur permettrait de fêter leur retour à la Coupe du Monde FIBA, 13 ans après leur dernière participation.

Quoi qu'il en soit, alors que la campagne qualificative pour la Chine touchera bientôt à sa fin, une chose est sûre : après avoir vu les prouesses de Delle Valle sous le maillot Azzurri, et malgré l'enjeu, les fans de l'Italie ont envie de retenir leur souffle à chacun de ses tirs, si stressants et grisants à la fois.

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