Le basketball, une sorte de remèdes aux maux du Soudan du Sud

JUBA (FIBA AfroBasket 2017) - Le Soudan du Sud, plus jeune nation au monde, fêtera son sixième anniversaire le 9 juillet prochain. Il est le fruit d’une bataille pour la dignité et contre l’oppression, comme de nombreuses autres nations africaines avant lui.

Les conflits et les combats sont malheureusement toujours d’actualité dans certaines régions de la nation est-africaine, et nombreux sont ses ressortissants, désireux de liberté, qui fuient encore le pays. Certains ont trouvé refuge dans les pays avoisinants, tandis que d’autres sont partis bien plus loin.

Le basketball m’a énormément aidé à digérer des souvenirs pénibles.- Chier

Pour Chier Mathiang Ater Chier et Mathiang Mauot Muo, les USA et l’Australie sont devenus leurs nouvelles terres d’accueil, synonymes d’opportunités grâce au basketball.

Ils y ont fait de nouveaux amis, y ont trouvé des bonnes conditions de vie et surtout la paix, conséquence directe d’une sérénité qui compense presque toutes les souffrances qu’ils ont vécues jusqu’alors.

Ils ont pu nourrir leurs ambitions de basketteurs, bénéficiaires de bourses d’étude couvrant les frais d’une éducation qui serait sinon hors de portée pour eux.

Chier, qui est né à Akot, petite ville située au centre du Soudan du Sud, est l’aîné d’une famille de 10 enfants. Pour lui, la prise en charge offerte par l’Université de Portland en Oregon est tombée comme une bénédiction.

                 Chier Mathiang (#15) avec l'équipe du Sydney Open en 2014

Lors d’un entretien exclusif avec FIBA.com, Chier dit : "Le basketball m’a énormément aidé à digérer des souvenirs pénibles. Grâce à lui, j’ai pu aller dans des endroits que je n’avais même jamais osé rêver visiter et j’ai rencontré des gens formidables. J’ai reçu une éducation gratuite, ce qui a permis de soulager mes parents. J’ai rencontré des personnes de cultures diverses et j’ai lié des amitiés qui vont bien au-delà du basketball."

Chier et Muo ont représenté le Soudan du Sud lors des éliminatoires du Groupe F en vue du FIBA AfroBasket 2017 au Caire, en Égypte, le mois passé - une première pour les Bright Stars, surnom donné à leur équipe nationale de basketball.

Muo partage son excitation : "C'était un honneur et un privilège de représenter le Soudan du Sud aux éliminatoires de la Zone 5. Pour un joueur de basketball, il n'y a pas de meilleur sensation que celle de jouer pour son pays dans un événement international, ce d'autant que c'était la toute première apparition du Soudan du Sud. D'avoir pu écouter l'hymne national sud-soudanais dans ce contexte n'était pas quelque chose d'inoubliable que pour moi et mon équipe, mais aussi pour toute la communauté sud-soudanaise présente au Caire durant le tournoi."

Chier ajoute : "Quand j'ai reçu un email me demandant de représenter le Soudan du Sud, j'ai été très ému et je n'ai pas eu besoin de réfléchir à deux fois avant de signer le document. Les mots ne peuvent pas vraiment décrire ce que j'ai ressenti au moment où a été diffusé l'hymne national. C'était quelque chose de très spécial pour moi, parce que cela m'a fait repenser à tous les obstacles que nous avons dû surmonter pour obtenir notre indépendance. Cela signifie tout de pouvoir représenter le Soudan du Sud à ce niveau-là. Je suis le deuxième plus jeune de l'équipe, je suis extrêmement honoré d'avoir pu faire partie de cette expérience."

À 21 ans, Chier a été incroyablement précieux pour la sélection de Jerry Steele, affichant des moyennes de 18.5 points, 6 rebonds et 3 passes décisives par match.

Dans le difficile Groupe A, le Soudan du Sud a commencé le tournoi par une défaite 87-76 contre l'Égypte, Chier inscrivant à cette occasion 20 points et Atem Kuol Atem Bol captant 9 rebonds.

Le revers contre le Rwanda (80-90) dans le deuxième match, en dépit des 22 points de Chier, a quasiment mis fin au rêve de demi-finale.

Les Bright Stars ont su toutefois réagir en prenant le meilleur sur le Kenya 89-84, au terme d'un match serré qui a vu Muo, auteur de 34 points, faire tout l'étalage de son talent dans la raquette, tandis qu'Ajak Ateng Magot Anok a pris 13 rebonds.

Cette victoire, la première à ce niveau, a redonné espoir aux Sud-Soudanais et restera à jamais gravé dans leurs mémoires.

Muo a été dans l'ensemble le Sud-Soudanais le plus performant avec de belles statistiques : 18.8 points, 6.3 rebonds et 2.8 passes décisives de moyenne par match, et notamment 92.6 % de réussite depuis la ligne des lancers francs.

Ce résultat a servi de signal d'avertissement pour les rivaux du Soudan du Sud, désormais informés que ce pays était en pleine renaissance, porté par un enthousiasme qui pourrait lui permettre de dominer non seulement sa région, mais également le continent tout entier.

Avec à l'esprit le titre conquis au World Indigenous Basketball Challenge en juillet 2016 - dont Muo a été désigné le MVP, le Soudan du Sud a démontré que le basketball pourrait être le vecteur du talent dont regorge le pays.

Muo et Chier incarnent les milliers de Sud-Soudanais à travers le monde dont les vies ont été touchées par le basketball.

FIBA